A2.3. DEUX TENDANCES

A2.3.1. LE CHOIX
Dans le chapitre A2.1.2.1., nous avons observé l’évolution possible d’une demi-droite. A partir de l’état d’égalité intérieur - extérieur, elle prenait l’une de deux directions ; une pour devenir un point, ou l’autre, pour devenir une droite. Mais, qu’est-ce qui faisait qu’elle allait dans l’une ou l’autre
direction ? 
A priori, dans l’égalité parfaite, les chances sont égales pour les deux opposés. Cependant, le choix se fait. Comment ? Est-ce le hasard ?
Dans ce cas, « le hasard » , c’était le champ de notre observation, c’était notre pensée qui décidait (15.0.). En effet, le choix de la direction à emprunter, à partir de l’état d’égalité parfaite, est fait par l’observateur extérieur, par son champ d’observation (15.3.,  15.4.). Et ce champ, à son niveau, est l’expression de la « pression de l’intérieur », l’expression de sa matière-connaissance.

 

NOTES :

  1. La présence d’un champ, d’une objectivité ou encore, d’un milieu-énergie, est nécessaire pour qu’une matière, une connaissance, une subjectivité, un individu ou un germe-matière puissent se développer. (Le transfert 2.2.6. et 15.0.)
  2. Ou, en allant un peu plus loin : « Pour qu’une connaissance puisse générer sa propre pensée, une pensée extérieure à elle est nécessaire » (15.4.).
  3. Ou encore, une connaissance isolée, privée d’un champ-pensée extérieur, est l’ignorance. 

 

A2.3.2. CHAOS OU ORDRE ? ( fig. 7 )
Reprenons le thème des deux tendances - vers l’intérieur et vers l’extérieur - par un autre bout ( Certes, c’est aux bouts, aux limites que l’on transcende la rationalité du présent.). Soit.

 

Nous avons donc :

  • La tendance à produire du rationnel - réversible - , à transcender l’absurde, à aller vers l’égalité - équilibre - , vers le « I » (7.2.).
  • La tendance à créer de l’irrationnel irréversible et absurde, à transcender le rationnel et la raison, la tendance vers l’inégalité - chaos - , vers le « P - penseur » ou le « R - réalisateur » (chapitres 7.3. et 7.4.).

Nous savons que ces tendances sont la réponse - réaction opposée - à l’état réalisé par l’observateur donné. Dans ce contexte, considérons un segment, soit un fragment d’une droite infinie, comme le modèle d’un individu-observateur en état d’égalité (1). Il est composé de la connaissance-intérieur ayant deux limites : G et S (fig. 11a). Sa pensée, exprimant la tendance à transcender son état, se manifeste à ses limites.



A2.3.2.1. VERS L’ABSURDE
Etant en état d’égalité et de raison (sa linéarité), le segment manifeste la tendance à transcender cet état par la création du déséquilibre. 
- Où cela peut-il se manifester ?
- Aux limites, bien sûr. 
- Et quel sera l’élément déséquilibrant ? 
- Un élément lui ressemblant - un segment.

En effet, à la suite d’une action déséquilibrant, sur la limite, par exemple G (fig. 11b), est créé un segment transcendant. Il est, en fait, la prolongation du segment GS, mais cette prolongation est faite dans une direction différente de celle indiquée par la connaissance de base, c’est une continuation « erronée » : le segment transcendant appartient au monde à dimension supérieure (2). Pour l’observateur - segment GS, de départ en état d’égalité, ceci représente une tendance vers l’inégalité, vers l’absurde, ou encore, l’observation discontinue. 
Cependant, étant dans le nouvel état et ayant gardé la mémoire de l’état antérieur ( le segment originel ), cet observateur voudra se rééquilibrer. En conséquence, il produira, par le même processus de transcendance, un nouveau dépassement à son autre limite S (fig. 11c). En effet, à présent, il est plus symétrique qu’avant.
Or, le même genre de dépassement qui, précédemment, le déséquilibrait, maintenant, le mène vers l’équilibre.


(1) La naissance d’un segment résulte de l’imposition des limites-ruptures à l’unité-droite (A2.2. Notes). Le segment est une fraction, une pensée de « l’un ». Ce n’est que quand il est séparé de sa droite-mère d’une distance infinie qu’on peut le considérer en équilibre : un nouvel « un ».
(2) La rupture - séparation - du segment transcendant du segment-mère fait naître un nouveau segment.

 

 

NOTES :

  • Toutes ces remarques sont extrêmement banales ; cependant, pour nous, c’est dans l’ordinaire, dans la simplicité, que se cache l’extraordinaire. Nous nous excusons de cette justification - confession - inattendue ( nous rééquilibrant ).
  • Pourtant, si l’on y regarde de plus près, le dépassement à la limite S n’est pas un vrai dépassement, il ne crée pas une nouvelle dimension, il est la copie ou la répétition du premier dépassement. C’est le retour à la raison - création de la matière et de la connaissance.
  • L’on pourrait imaginer que le second dépassement surgisse à la même limite G (fig. 11d). Cependant, ce serait une rationalisation locale, qui équilibrant le premier dépassement ajouterait un déséquilibre à l’ensemble de l’individu.


Après le deuxième dépassement « raisonnable » (fig. 11c), les deux nouvelles matières transcendantales font partie de l’individu. En conséquence, apparaissent des nouvelles limites : G’ et S’ (fig. 11e) et c’est là que des nouvelles pensées, les transcendances du raisonnable symétrique, peuvent surgir (S’’ et S’’’).

 

NOTE :

  • L’on pourrait dire, ici, qu’attribuer la faculté de penser, la souffrance, le plaisir et d’autres sentiments chers aux êtres humains à un segment ou aux autres concepts abstraits - comme nous le faisons tout au long de notre quête - est de l’anthropomorphisme délirant. Certes, penser que l’homme seul pense est très glorieux, pour lui. Et que celui qui le pense demeure dans la gloire de sa pensée pour l’éternité. Quant à nous, nous continuons notre chute.

 

PENSEES :

  • L’introduction du déséquilibre engendre une nouvelle dimension.
  • Le segment transcendant est un concept créé par le segment originel. 
  • Le concept, en général, est une copie d’une partie de la connaissance placée dans un domaine où la connaissance que représente cette copie n’est pas réversible avec la connaissance qui la créée. Dans ce sens, pour la connaissance qui conceptualise, le concept est une ignorance (0.1.2.3.6.1.).
  • Au départ, une perturbation (observation) extérieure du segment pourrait être à l’origine de sa déformation et de la création du concept. Bien sûr à condition que le segment ne soit pas parfaitement « rigide ».

 

A2.3.2.2. LE CHAMP
PENSEES ERRANTES :

  • En fonction de la direction et du caractère du champ d’observation extérieure (A2.3.1), l’individu évoluera de manière différente. 
    Un champ fort, structurant, donnera naissance à des objets réguliers, raisonnables (fig. 11f). Par contre, un champ faible, objectif, favorisera des irrégularités (fig. 11g), des inégalités. Sans doute, la forme de l’objet que l’on observe reflète, dans une certaine mesure, le champ qui l’a créé. Aussi, en retrouvant notre pensée qui, dans le chapitre A2.1.2., observait la création d’une droite et d’un point, nous dirions à présent qu’elle exerçait un champ fort, subjectif, sur l’objet de son analyse.
  • Le champ extérieur fait naître certains individus-formes. La reproduction de ces individus-formes crée un continuum qui, à son tour, représente un champ. Les individus imparfaits ou encore, les déviations par rapport au continuum, tombant dans le champ qu’est ce continuum ou un autre, peuvent donner naissance à un nouveau continuum. Dans ce dernier continuum-champ, naissent d’autres individus-formes et ainsi de suite. 

 

 

A2.4. LE RYTHME

A2.4.1. LA TRANSE
Pourtant, n’oublions pas que, pour que notre segment-modèle puisse réaliser tous ces exploits et équilibristiques évolutives, il faut qu’il « soit ». Et c’est la reproduction des points successifs de son « corps » qui le crée. Nous le rappelons, car la reproduction ou encore, le rythme des répétitions ou encore, l’existence (3.1.) sont le véhicule de la pensée et, en général, de la transcendance (de ce rythme - continuité).
Dans le chapitre (A2.1.2.2.), nous avions noté (note 1) : « Une droite réelle, formée de points séparés, devrait être entourée d’un champ de dépassement ». 
C’était, en effet, une précieuse observation. A présent, nous pensons que ce champ, c’est la droite. Oui, la droite est la matérialisation de la transcendance collective des points dont elle est composée ! (A1.1.1.)
Cela est évident, mais il fallait du temps pour parvenir à cette conclusion. La droite, la pensée des points, est une matière. Mais ô combien différente de la matière que connaissent les points. Et voilà, c’est le rythme union-séparation (3.1. Existence) qui permet la transcendance, c’est lui qui crée une nouvelle dimension, transporte dans un nouveau monde.
Les points d’une droite, les coups du tambour en musique ou des battements du coeur, les observateurs en état de reproduction-existence, n’ont aucune idée ou conscience que, autour d’eux, à leurs limites, flotte une droite, ou qu’ils produisent de nouveaux mondes : ils sont en transe. 
Oui. La droite glisse le long des points qui répètent un rythme, qui vibrent. 

Et si l’on en revient à notre segment, nous dirons que les points séparés sont à l’intérieur de lui et qu’il est leur enveloppe (5.19.), leur matière transcendantale, leur pensée - la « peau ». Nous dirons aussi, qu’à ses limites, où l’état de transe est rompu, les points s’échappent de leur enveloppe et créent un champ - la pensée du segment, le dépassement, le champ de conception. (5.10.1.5.11.5.12.)

 

NOTE :

C’est dans le rythme de répétition, dans l’existence, dans la continuité que le multiple devient « un » - absurde. (1.6.2., 1.6.3., Deuxième Partie - méditation)

Le rythme - existence - est la répétition d’une raison locale.

 

PENSEES ERRANTES :

  • La raison, une réversibilité d’états d’union et de séparation, une linéarité, une égalité de traitement de la matière et de l’énergie, permettent la communication - union et séparation - sans distorsions de la connaissance et de l’ignorance absurdes.
  • La raison est un conducteur-chemin permettant l’égalisation - décharge - réciproque des absurdités, du plaisir et de la souffrance, de la rationalité (R) et de l’irrationalité (P) excessives.
  • Les éléments réversibles, manifestant l’évocation-pensée réduite, donc neutres, servent, pour l’irréversible, de support pour la communication - observation. ( 7.2.3.,  8.3.8.8.4.)
  • Là, où règne la réversibilité d’états, il y a des lois permettant cette réversibilité.

 


A2.4.2. LE DEPASSEMENT DU RYTHME
Le rythme, la régularité, la réversibilité, la continuité, la linéarité sont des synonymes de l’existence et de la conscience d’être différent du milieu, du multiple, des autres, du chaos (chapitre 3.1.), de l’irrégulier et, enfin, du vide.
Or, l’état d’être réversible, raisonnable, quand il est profond, évoque son état opposé et « équilibrant » : l’état de ne pas être « cette répétition-existence » ou, encore, évoque l’absurde : absence - une non-existence. Ce qui existe montre alors une tendance à rompre son rythme, à créer de l’irrationnel non-répétitif et absurde, à transcender la répétition et la connaissance qui le construisent, et se dirige vers l’inégalité, la non-linéarité, les autres existences, vers le chaos.
Les dépassements de la raison, la transcendance du présent, la pensée sont, en effet, des expressions de cette tendance « équilibrant ». Accompagnés de la conscience de séparation, ils sont la souffrance, une rupture - non-linéarité - de l’existence.

 

PENSEES :

Les dépassements, grâce à l’affaiblissement du rythme de l’existence, permettent d’apprendre à transcender la transe du rythme de la raison, du plaisir et de la conscience d’union qui en résulte. Or, en cas d’une rupture accidentelle du rythme-existence, l’observateur qui sait transcender son rythme-plaisir d’être, qui a l’expérience de la conscience de séparation et de la souffrance, s’adapte aux changements provoqués par les champs extérieurs, alors que l’autre, celui qui ne connaît pas le dépassement et la souffrance, est détruit par ces champs.

La transcendance de l’état de « continuité » - la pensée - est une simulation des ruptures dues au hasard. Et, comme telle, la pensée, à tous les niveaux de complexité, en interrompant l’existence-transe, protège cette même existence.

La pensée - une rupture simulée - dépasse le présent réversible et local, et crée les concepts du passé et du futur, afin de protéger ce même présent des ruptures causées par l’absurde, extérieur à lui.

La pensée devance, prévoit le hasard (3.7.).

 


A2.4.3. L’ARRET
- Où est la limite de l’existence-répetition ? 
- Où mène l’existence, la transe ininterrompue ? 
- Nous l’avons dit plus haut : quand l’état d’être est suffisamment profond, il évoque son état opposé et équilibrant. 
- Quelle est cette profondeur ? Jusqu’à où faut-il aller pour pouvoir
s’arrêter ?